Châteaux en Pays de Loire 13

CHATEAU D’AMBOISE 1

AMBOISE : vrai château royal, sur l’éperon du Châtelier, 40 mètres au-dessus du village, forteresse impressionnante, sur ses impressionnants remparts, et ses impressionnantes tours énormes, la tour des Minimes (21 m de diamètre) sur la façade nord (ici à gauche) et la tour Heurtault (24 m de diamètre), sur la façade ouest du château, une troisième était projetée par Charles VIII. Imposantes et largement admirées par le mémorialiste Philippe de Commyne.

Château et pont d' Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château et pont d’ Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY

🔎 La vallée de la Loire est le centre du pouvoir royal depuis Charles VII et AMBOISE le château royal par excellence où se sont succédés les souverains Charles VIII, le bâtisseur, Louis XII, François 1er, Henri II. Mais avant eux, l’arrivée à Bourges de Charles VII en 1418 et de son épouse Marie d’Anjou marque le début du séjour des rois de France en Val de Loire. Toutefois, ce dernier préfèrera les châteaux de Loches et de Chinon au Château fortifié d’Amboise. Son fils, Louis, quant à lui, résidera en son château de Plessis-Lès-Tours (La Riche) mais choisira cependant Amboise pour la résidence de la reine, Charlotte de Savoie et du dauphin – le futur Charles VIII qui naîtra donc ici, à Amboise en 1470. Il fait édifier un nouveau logis et un oratoire du Saint Sépulcre, appuyé contre le mur d’enceinte au sud, à l’origine de la future Chapelle Saint-Hubert. (Photo 11, 12, 13)

Château d'Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d'Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY

La tour Heurtault  intégrant une vaste rampe cavalière en forme d’hélice en pente douce (tout comme nos parking enterrés d’aujourd’hui … mais sur 40 mètres !) qui permettait aux cavaliers et aux attelages d’accéder aux terrasses du château.

Château d'Amboise, tour Heurtault -CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise, tour Heurtault -CC BY-NC Jacques BOUBY

On a dénombré ici pas moins de 120 culs-de-lampe dans cette tour, représentants des personnages hybrides, grimaçants, violents, fous, obscènes, de plus en plus vulgaires au fur et à mesure de la descente de la tour, depuis le niveau noble de la cour du château jusqu’à l’étage inférieur de plain-pied avec la ville populaire, où… l’on se gratte ostensiblement le cul !… Bref, drôlatiques et grotesques comme le Moyen âge savait en produire.

🔎 Par une sombre-nuit-d’hiver de 1539, en visite, Carlos Quinto oui, celui  qui clamait à qui voulait l’entendre : « En mi imperio, no se pone nunca el sol » est reçu en tout honneur au bas de la rampe cavalière de la tour Heurtault par François 1er. Les deux monarques traversent une haie d’honneur que leur faisaient les seigneurs de France vêtus richement à l’italienne et les dames de la cour aux manières de France. La tour était entièrement recouverte de lourdes tentures de beau velours cramoisi de haut en bas ; Du Bellay écrit :

« Icelle tour était ornée de tous les ornements dont on se pouvait aviser, et tant garnie de flambeaux et autres luminaires, qu’on y voyait aussi clair qu’en une campagne en plein midi. ». Comme d’hab, François avait tout fait pour épater son meilleur ennemi ! 

Et voilàtipas que soudainement la torche d’un garde enflamme une tenture murale lors de l’ascension du convoi impérial. Panique et grÔsse fumée ! Insanité pendable ou … attentat délibéré ? François furieux veut faire pendre sur-le-champ le coupable. L’empereur, royal ! l’en dissuade et pardonne à l’étourdi et …. à la France qu’il révère. N’a-t-il pas écrit un jour : « Si j’étais Dieu et que j’avais deux fils, je donnerais à l’aîné le ciel et au cadet la France » ?

Château d'Amboise, entrée tour Heurtault et chapelle saint Hubert -CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise, entrée tour Heurtault et chapelle saint Hubert -CC BY-NC Jacques BOUBY

NB Notez à gauche la chapelle saint Hubert sur son haut promontoire.

Maquette château d'Amboise
Maquette château d’Amboise

Voici une maquette 3D permettant de restituer le château dans tous ses états, depuis le moyen-âge jusqu’à aujourd’hui à l’aide des données scientifiques récemment collectées. Les guides et le dépliant officiel de visite ont beau nous répéter que « contrairement aux idées héritées du XIXè siècle, 75% du château édifié ont subsisté jusqu’à nos jours », cette affirmation me laisse bien sceptique et j’ai réalisé pour vous un montage représentant deux états du château. Jugez vous-même de la déperdition et… de l’anémie actuelle !

Mais pourquoi donc ? qui ? quand ? comment ? Aïe Aïe Aïe ! Amboise est offert en 1803 au Sénateur Roger Ducos, ancien membre du Directoire, que le Premier Consul Napoléon Bonaparte (futur Napoléon 1er) tient à remercier pour son aide dans sa prise de pouvoir. Pour «rénover le Château » 🤪, le Sénateur-Ducon-sans-le-sou ordonne dès 1806 la destruction des bâtiments en ruine (le logis des Sept-Vertus et des bâtiments attenant), en mauvais état ou « inutiles » sic !. Il fait notamment abattre l’aile Henri II et la Collégiale Saint-Florentin (édifice du XIè siècle) et la maison canoniale.

 Merci merci, monsieur le Sénateur inamovible, Comte de l’Empire, Pair de France, Grand officier de la légion d’Honneur, Féroce Destructeur Dévastateur : nous préférons très largement… le prince de Talleyrand-aux-poches-pleines et de si bon goût !

Château d'Amboise,-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise,-CC BY-NC Jacques BOUBY

Or donc, Il ne subsiste en effet que deux ailes, celle de Charles VIII, marqué par le gothique tardif, ses fenêtres à meneaux et, perpendiculaire, celle de Louis XII, d’inspiration Renaissance et ses fenêtres à pilastres et lucarnes à candélabres.

Château d'Amboise,-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise,-CC BY-NC Jacques BOUBY

Belle allure de la façade nord, donnant sur la Loire, avec à sa base, le « promenoir des gardes » communiquant avec la salle des gardes, façade rythmée par des contreforts ornés de niches ouvragées avec ses vastes fenêtres précédées du balcon où les conjurés (conjuration d’Amboise = complot ourdi contre le gouvernement des Guises, pour s’emparer du jeune roi François II et de sa famille par la force dont le chef est Jean du Barry, du Périgord) qui avaient échappé à la hache ou à la noyade furent pendus et exposés au bon peuple. Afin, bien entendu, que nul n’en ignore ou n’en prétexte ignorance !

Tout en haut les magnifiques lucarnes à gables ajourés dans le plus pur style flamboyant.

Château d'Amboise, lucarnes à gables ajourés-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise, lucarnes à gables ajourés-CC BY-NC Jacques BOUBY
 Château d'Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY
  • Cette statue de Léonard de Vinci matérialise l’emplacement où s’élevait jadis la Collégiale Saint Florentin (datant de … 1030 ! et détruite par … qui vous savez, à présent 🤪) où il avait souhaité, et par testament, être inhumé en mai 1519. Selon la rumeur du temps, un jardinier nommé Goujon aurait recueilli les ossements exhumés dans l’édifice pour les enterrer dans un coin de la cour.
 Château d'Amboise, statue de Léonard de Vinci-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise, statue de Léonard de Vinci-CC BY-NC Jacques BOUBY

En 1863, Arsène Houssaye, écrivain et critique d’art, et inspecteur des Musées de France entreprend des fouilles sur le site de l’ancienne collégiale et met à jour un squelette entouré de pièces de monnaies italiennes et française du règne de François 1er et une pierre tombale  avec des fragments du nom de l’artiste. En 1874, ces ossements présumés de Léonard ont été réinhumés dans la chapelle Saint-Hubert.

Château d'Amboise, chapelle Saint Hubert-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise, chapelle Saint Hubert-CC BY-NC Jacques BOUBY

L’élégante chapelle Saint Hubert est donc bâtie, comme écrit plus haut, sur l’ancien oratoire érigé sous Louis XI. Outre sa notoriété due à la présence de la sépulture de Leonardo da Vinci, cette chapelle privée des souverains reste un bel exemple du style gothique flamboyant. Le portail se compose de deux portes en anse de panier à peine cintrée séparées par un pilier central, d’un linteau et d’un tympan.

Château d'Amboise, chapelle Saint Hubert, tombe Leonard de Vinci-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise, chapelle Saint Hubert, tombe Leonard de Vinci-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d'Amboise, chapelle Saint Hubert, tympan-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise, chapelle Saint Hubert, tympan-CC BY-NC Jacques BOUBY

Le tympan est divisée en trois lancettes trilobées. Au centre, la Vierge à l’Enfant, couronnée et nimbée, dans une mandorle de roses, entourée de quatre anges thuriféraires. Dans les lancettes latérales, les commanditaires de la chapelle, dans la posture de donateurs : Charles VIII avec le blason aux armes de France, et Anne de Bretagne, tous deux devant une tenture aux motifs de fleurs de lis et mouchetures d’ hermine. Très fin et raffiné !

En dessous, le linteau un peu plus dégradé et … fort encombré : à gauche, saint Christophe, l’enfant Jésus sur son épaule et traversant le gué ; protection des voyages, pélerinages, croisades, passages de gué et de pont ??? à droite, conversion de Saint Hubert, face au cerf à la croix entre les cornes, (selon l’habituelle thématique, développée en particulier dans Les Grandes Heures d’Anne de Bretagne (1503-1508), commandé par la reine  à Jean Bourdichon) ; recherche d’une protection contre les périls extrêmes, ceux de la rage et des dangers de la chasse ??? A noter que saint Christophe a perdu son bâton et saint Hubert son épée ! Au fond à gauche, l’ermite guidant saint Christophe de sa lampe (cassée elle aussi)

Remarquez le clocher orné de quatre bois de cerfs en dédicace à Saint-Hubert comme chacun sait, patron des chasseurs.

Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY
Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY
Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY
Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d'Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d'Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY

Terrasse de Naples, Située à la gauche de la galerie d’Aumale, cette terrasse présente trois belvédères qui dominent la Loire. Elle accueille le premier jardin Renaissance du Val de Loire à la fin du XVesiècle, réalisation de Pacello da Mercogliano.

Château d’Amboise-CC BY-NC Jacques BOUBY

🔎 Après son entrée à Naples en février 1495, Charles VIII est fasciné … (outre par les belles, avenantes et folâtres napolitaines vêtues parfois de quelques rangs de perles qu’il invitait à ses fêtes et bals quasi quotidiens ),…  par la beauté des jardins de la ville : « En vérité, écrit-il à son beau frère, le duc de Bourbon, il me semble qu’il ne manque qu’Adam et Ève pour en faire un paradis terrestre, tant ils sont beaux et pleins de bonnes et étranges choses. ».Il rencontre Dom Pacello da Mercogliano, moine bénédictin qui a aménagé les sublimes jardins de la Villa Poggio Reale sur les hauteurs de Naples, consacrant ainsi sa renommée en ingénierie et jardinerie. Charles VIII mit dans ses bagages de retour ce «Léonard des Jardins », lequel servira trois rois de France : Charles VIII, Louis XII et François 1er.

Château d'Amboise, Terrasse de Naples-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise, Terrasse de Naples-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d'Amboise, Terrasse de Naples-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise, Terrasse de Naples-CC BY-NC Jacques BOUBY

Ce génie paysagiste affranchira totalement le jardin de sa clôture médiévale, l’ouvrira sur le paysage environnant et la vallée et le situera au plus près du logis et donc sera ici même aménagé au sein de l’enceinte du château  et… l’agrémentera de plantes rares et exotiques.

Château d'Amboise, Terrasse de Naples-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château d’Amboise, Terrasse de Naples-CC BY-NC Jacques BOUBY

 Ainsi la Terrasse de Naples pourra être admirée par l’ouverture de la galerie du nord, de ses baies et de ses balcons, en saillie du rempart ainsi que de la façade est de l’aile Renaissance. D’ailleurs le logis de François 1er et de la reine Claude témoigne du désir de vivre près des jardins. Ce concept allait générer tous les grands jardins de Loire !

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