Châteaux en Pays de Loire 7

CHATEAU de BLOIS 1

Eh non, ce n’est pas sur le parvis de Chambord que nous nous retrouvons comme nous l’aurions dû.

J’ai préféré conserver cette vision pour la conclusion du voyage, le feu d’artifice terminal, l’apothéose, tant nous fûmes sous le charme de cet ensemble. Magique. Envoûtant. Extravagant et … Profondément inutile. Vous ne regretterez pas cette entorse à la chronologie du voyage.

Conséquemment, nous voilà donc à BLOIS, concentré d’architecture et… concentré d’histoire, 7 rois et 10 reines, quant aux maîtresses… ; 600 ans de fêtes somptueuses, de mariages, d’alliances, de trahisons, de passions, de complots, d’assassinats… l’histoire humaine, quoi !

Bâtiment fort composite puisque pour le prix d’un billet, vous visitez quatre châteaux ! comme vous pouvez le voir sur la reproduction du dépliant officiel de la visite

Blois, Doc visite
Blois, Doc visite

C’est par l’entrée de l’aile Louis XII qu’on pénètre dans le château. Dans une niche flamboyante et dentelée, surmontant la porte d’entrée, trône la statue équestre de Louis XII. Certes, ce n’est plus l’ouvrage original du XVè, qui d’ailleurs devait être fort dégradé quand il fut détruit en 1792 pendant la révolution française, c’est le sculpteur M. Seurre qui en a réalisé en 1858 une reproduction fidèle grâce aux dessins conservés au Cabinet des Estampes.

Château de Blois, entrée, Aile Louis XII-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château de Blois, entrée, Aile Louis XII-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château de Blois, entrée, Aile Louis XII, détail-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château de Blois, entrée, Aile Louis XII, détail-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, entrée, dét-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, entrée, dét-CC BY-NC Jacques BOUBY

Zoomez, juste en dessous, sous les rinceaux, le porc épic et les initiales couronnées L et A sont celles de Louis XII et d’Anne de Bretagne.

Admirez cette aile Louis XII, briques rouges et chaînages de pierre blanche y produisent un ensemble harmonieux, gai et lumineux. À droite toute, la chapelle Saint-Calais ou ce qu’il en reste puisque, la nef a été détruite par Mansart lors des travaux de l’aile Gaston d’Orléans.

Blois, cour intérieure-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, cour intérieure-CC BY-NC Jacques BOUBY

Certes il s’agit bien d’art gothique avec ses hautes toitures en poivrière, ses larges fenêtres ouvragées, les gables triangulaires au-dessus des lucarnes mais…Tout de même, quand on regarde les galeries ouvertes du bas, on leur trouve un petit goût d’Italie.

Château de Blois, intérieur, Aile Louis XII-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château de Blois, intérieur, Aile Louis XII-CC BY-NC Jacques BOUBY

Vous avez vu les spectaculaires changements d’éclairage ? Le ciel était épouvantablement changeant ce jour là et … ce fut l’enfer pour votre photographe préféré qui, à chaque instant de la visite scrutait le temps à travers les ouvertures et dévalait les escaliers à tout rompre vers la cour dès qu’une éclaircie souvent fort éphémère survenait…de multiples allers-retours, Doudoue peut l’attester !

Château de Blois, intérieur, Aile Louis XII-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château de Blois, intérieur, Aile Louis XII-CC BY-NC Jacques BOUBY

 Savez-vous que Charles VIII, son cousin et prédécesseur sur le trône avait ramené d’Italie 23 artistes ? Et que Louis XII ayant participé à l’expédition d’Italie se serait bien vu « roi » du Milanais !

Dès son avènement, après la mort de Charles VIII, le 7 avril 1498, Louis XII (lui-même né à Blois) transporte sa cour à Blois, décide d’embellir la demeure et d’en faire la résidence du roi et de la reine, Anne de Bretagne.

Quand Louis XII meurt en 1515, les bâtiments qui portent son nom étaient terminés depuis un an au moins ; c’est dans cette partie du château qu’Anne de Bretagne était morte, un an auparavant. 

Château de Blois, Aile François 1er-CC BY-NC Jacques BOUBY
Château de Blois, Aile François 1er-CC BY-NC Jacques BOUBY

L’aile François Ier : édifiée moins de quinze ans après l’aile Louis XII, entre 1515 et 1524, en deux campagnes, (interrompues par la mort de Claude de France, la reine) d’abord le côté cour, plus tard le côté jardin, le bâtiment des loges.

Toute en tuffeau, elle illustre la rapide évolution du décor architectural influencé par la Renaissance italienne, appliqué sur des structures encore très françaises. Notez la puissante corniche qui règne au sommet de la façade et contourne et achève la tour de l’escalier, elle a ma foi un air très florentin !

Blois, Aile François 1er, escalier-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, Aile François 1er, escalier-CC BY-NC Jacques BOUBY

On ne peut qu’admirer ce magnifique escalier d’apparat, sa voûte hélicoïdale, ses multiples sculptures et emblèmes, enfermé dans une tourelle octogonale ajourée, construite en saillie : dynamique, splendidement décoré, à coup sûr … géniteur de l’escalier de Chambord.

Blois, Aile François 1er, escalier, détail-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, Aile François 1er, escalier, détail-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, Aile François 1er, escalier, détail-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, Aile François 1er, escalier, détail-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, galerie de portraits-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, galerie de portraits-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, galerie de portraits-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, galerie de portraits-CC BY-NC Jacques BOUBY
Louis XII, Blois, galerie de portraits-CC BY-NC Jacques BOUBY
Louis XII, Blois, galerie de portraits-CC BY-NC Jacques BOUBY

Le roi Louis XII

🔎 Il y a longtemps que Louis XII voulait répudier la pauvre Jeanne de France, difforme, bossue, rachitique et affligée d’un pied bot que ce sal..ard de Louis XI lui avait fait épouser de force, fiancés enfants et mariés, elle, à 12 ans, lui à 15. Il voulait neutraliser ce gênant filleul et surtout, – il s’en vantait -, aucune progéniture mâle et saine ne pouvait surgir de cette « tordue » de Jeanne qui puisse l’inquiéter. Dans le doute tout de même, il s’en était allé faire fissa et rapido presto un aller retour dans sa Charlotte de Savoie pour s’assurer de l’avenir de la dynastie, pensant bien sûr qu’elle lui pondrait un garçon. Eh oui ! La loi salique !

Pensez bien que le gamin Louis (XII) d’Orléans avait freiné des quatre fers, refusant une bancroche pour femme mais avait finalement consenti, menacé d’être envoyé céans dans un monastère.

Plus tard, il y eut ce contrat de Langeais, curieux : au cas où Charles VIII mourrait le premier dans le couple royal et sans héritier, Anne de Bretagne devait épouser son successeur. Bingo, quand le Charles se tapa le front à Amboise et ascendit ad Patrem, séki ki se mit à reluquer vers la fort jolie dame en deuil, redevenue duchesse mais … inconsolable ? Vingt ans qu’elle avait. Louis fit tant et tant et si… tendrement qu’il finit par la consoler par sa … singulière bénévolence et l’acheva en lui offrant à Paris un enterrement en grande pompe pour son ex. Gagné !

Blois, Livre d'heures d'Anne de Bretagne, Jean Bourdichon-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, Livre d’heures d’Anne de Bretagne, Jean Bourdichon-CC BY-NC Jacques BOUBY

… Oui mais… il fallait faire casser son mariage avec la bancroche par Rome. Alleluia, le bon pape était Alexandre Borgia, d’un modèle spécial et aux inclinaisons bien connues ! Dard-dard, Louis XII lui envoya en recommandé quelques-unes des plus belles filles de la cour et … quelques sous : illico, un procès s’ouvrit en la cathédrale Saint Gatien de Tours pour faire annuler le gênant mariage.

Las ! il fallait une autre dispense car Louison et Annette étaient cousins. Pâquesdieu ! Ouf ! une fois encore le pape Alexandre Borgia consentit… en exigeant cette fois pour son fils bien aimé Cesare le duché de Valentinois et “la main“ (!?) d’une princesse française. Ainsi Louis XII put épouser la femme du feu roy, coucher dans son lit sa chère petite bretonne, et comme disent les belges, mettre le pape dans Rome. 

Blois, Livre d'heures d'Anne de Bretagne, Jean Bourdichon-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, Livre d’heures d’Anne de Bretagne, Jean Bourdichon-CC BY-NC Jacques BOUBY

Elle mourut ici en février 1514 à 38 ans. Aïe aïe ! sans lui avoir fait le moindre enfant mâle malgré ses six grossesses. Gros chagrin, grosses larmes, puis … la solitude vint ! Le finaud roi anglais Henri VIII jeta dans le lit du veuf de 54 ans, une gracieuse blonde de 16 ans, Mary d’Angleterre, sa propre soeur, à la braise ardente qui l’embrasa tant et tant que le gentil bon peuple pensa que le roy d’Angleterre avait envoyée une haquenée au roy de France, pour le précipiter dans le tombeau. Arme fatale en effet : marié le 9 octobre 1514… il mourut le 1er janvier 1515 !

Dessus de cheminée : L’A et l’L du roi et de la reine s’y répètent au milieu de leurs armoiries, le porc-épic que Louis d’Orléans avait pris pour emblème de la défense, Continus et eminus, et l’hermine d’Anne de Bretagne, et des trois fleurs de lys d’or sur champ d’azur, qui sont les armes de France.

Blois, Dessus de cheminée-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, Dessus de cheminée-CC BY-NC Jacques BOUBY

Pourquoi la devise : « de près et de loin » (Continus et eminus)? Par allusion aux épines du porc-épic qui transpercent « de près ». Certes mais pourquoi « de loin » ??? Ben… parce ce qu’on pensait alors que le porc épic pouvait lancer ses épines sur ses assaillants, telles des flèches ! 

Pour l’emblème des ducs de Bretagne, la devise était sans embrouille : potius mori quam foedari (plutôt la mort que la souillure). C’est plus classe et moins con.🤪

Blois, emblème Louis XII-Claude de France-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, emblème Louis XII-Claude de France-CC BY-NC Jacques BOUBY

Peinte et dorée à l’effigie de François Ier (salamandre et fleurs de lys) et de Claude de France (hermine) elle est également décorée d’un mélange d’éléments de style italien, des guirlandes de fleurs et de fruits, des rinceaux, candélabres et festons, et … l’indispensable bataillon de putti.

Blois, le studiolo, de Catherine de Médicis-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, le studiolo, de Catherine de Médicis-CC BY-NC Jacques BOUBY

Probablement le seul et fort précieux témoin de l’époque : le lambris de 237 panneaux, sculpté peint et doré couvrant les murs de la garde robe de François 1er, devenu plus tard le studiolo, le cabinet de Catherine de Médicis.

Blois, intérieurs château-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, intérieurs château-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, intérieurs château-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, intérieurs château-CC BY-NC Jacques BOUBY

Notez cet agréable et brillant carrelage d’un bleu royal ; eh bien ? il est posé … d’avant hier ! Dur mais VRAI : Tous les intérieurs datent ici de … 1845 ! Et oui, les appartements de François 1er, de Catherine de Médicis, d’Henri III, les décors, les tapisseries, l’organisation de l’espace, même : TOUT est inventé. Par Félix Duban, aîné de Viollet le Duc. Il a fait ce qu’il a voulu pu mais avec RIEN. Aucun revêtement de mur, aucun meuble royal n’a traversé les siècles. Or donc, tous ces riches décors polychromes, murs, plafonds et sols seraient complètement inventés ? Si fait !

Il a fait certes des hypothèses le Félix avec, on préfère l’imaginer, le souci du vraisemblable, mais aucun document d’époque n’autorise avec certitude une pareille reconstruction faite avec des crédits exceptionnels sans compter que sous le souci pédagogique, perce aussi son « romantisme ». Il était bien de son temps et non du temps de François 1er.

De plus, vous savez quoi ? j’apprends par la bande et le plus grand des hasards que les ancêtres de Duban étaient marchands faïenciers. Elles sont pas fraîches mes faïences ? Je vous en mets combien ? Bref, y en a ici partout !

Et c’est pas en ajoutant par là par ci, une mandoline, un clavecin, un buste d’Henri III ou Charles IX en plâtre, un violon en faïence de 1867, un vase antique avec des guerriers de 1872, une hallebarde etc. etc. que … l’on va se faire pâmer le chaland ! 

Blois, intérieurs château-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, intérieurs château-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, intérieurs château-CC BY-NC Jacques BOUBY
Blois, intérieurs château-CC BY-NC Jacques BOUBY

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