Une saison à Hato Piñero (6)
Les jours passaient avec bonheur dans cette immersion totale où nous essayions de nous fondre dans cette nature à mille lieues de celle des discours écologistes, tout autant d’ailleurs de celle des fervents productivistes. Non seulement ce monde immensément riche du vécu ne semblait nullement colonisé et … n’avait rien à produire, en tout cas pour le capitalisme consumériste, mais l’homme y paraissait transparent, hors de propos, inutile. Réduit à un simple VOYEUR pris en faute.
Ah Ah ! Voici l’arbre à boulets de canon (sic) lesquels non seulement explosent en tombant mais peuvent peser plusieurs kilos et atteindre 20 cm de diamètre. Autant ne pas les prendre bêtement sur le crâne !
les fleurs délicieuses du même Couroupita guianensis
C’est toute la richesse de HATO PIÑERO, je l’ai déjà évoquée, en contraste avec les mornes et vastes platitudes du grand sud : sa variété de sols et de paysages due aux grand nombre de ríos et de caños, proposent des végétations totalement opposées …
… ainsi ce jeune Palo borracho (bâton saoul, bâton ivre !?). ceiba chodatii, au tronc vert, aux incroyables et terribles piquants en rangs serrés, que j’ai associé au plus sec de sec que la savane ait engendré.
On appelle matas, ces associations d’arbres et d’arbustes de forme circulaire qui parsèment la savane. Même fort maigres à cette époque du verano, les ombres servent de refuge au bétail, sur ces terres plates irradiées de soleil.
Autre volet du ganado (bétail) élevé à Hato Piñero : les búfalos et surtout les búfalas pour leur lait à la saveur si caractéristique. Et… précieux : une fois et demi plus cher que le lait de vache ! Alors que leurs mamelles sont plus importantes et généreuses !
Nous avons plusieurs fois dégusté «leur» fromage (eh oui : la mozzarella !) d’un blanc de porcelaine, avec des goyaves confites.
Ce Búfalo de agua très résistant, aux jarrets souples et aux gros sabots, prospère dans les zones de terre inondée où aucun autre bovin ne peut vivre. Pourtant, loin d’être autochtone, il n’a été introduit dans le pays qu’en 1920.
Vivant en grande liberté, se moquant des épineux, et nourris entièrement d’herbe sauvage ils ont l’air de s’épanouir dans ces terres âpres.
Apparemment ils adorent faire trempette et même, s’immerger totalement et longuement. Eh oui ! La thermorégulation !
Certes, certes, tête moins avenante que notre bonne vache d’Aubrac, mais… sympa, tout de même quoique … aux yeux peu engageants.