Mais c’est lorsque l’on grimpe en haut du donjon que l’on découvre la merveille de Villandry. Là, sous vos yeux une éclatante symphonie végétale, enrichie de bassins, de fontaines, de tonnelles et sur plusieurs niveaux. Une géométrie élégante et savante de mosaïques de plates-bandes, de buis taillés en broderies, de charmilles, de cloîtres de verdure et d’une profusion de fleurs intermittentes et changeantes au gré des saisons.
C’est le docteur Joachim Carvallo et son épouse Ann Coleman, héritière de grands sidérurgistes américains, ayant fait l’acquisition de Villandry en 1906 qui vont créer ces jardins exceptionnels dans les années 1910 y consacrant leur passion, leur énergie et leur fortune en un temps où le château lui-même disparaissait au milieu d’une forêt d’arbres et de verdure. Notons que si les travaux de recherche en médecine sur la physiologie de la digestion que le docteur menait à la Faculté de Médecine de Paris, ne le prédisposaient pas fatalement à la réhabilitation du château et de ses jardins, il mit son esprit scientifique et sa rationalité à la réalisation ardue de cette tâche.
Telle une prolongation des salons intérieurs, le jardin d’ornement est lui-même divisé en salons de verdure. Au plus près du château, sous vos yeux, est le premier salon composé de quatre carrés (photos ci-dessus). D’inspiration andalouse, sa structure végétale dessine des formes géométriques qui constituent les « jardins d’Amour ». C’est Antonio LOZANO, peintre sévillan qui a conçu ces symboles végétaux de l’Amour tendre, de l’Amour passionné, de l’Amour volage et de l’Amour tragique : on y perçoit des cœurs séparés par les flammes de l’amour, des masques, des cornes de l’amour trompé, des lames de poignards et des glaives … Quant à la symbolique des topiaires de buis en érection … voyez vous-même !
Séparé par le canal, le deuxième salon de verdure du jardin d’ornement. Ici, c’est la musique qui est évoquée de façon symbolique par de grands triangles représentant des lyres, à côté desquelles figurent des harpes. Et… des jets d’eau pleurant dans les albâtres !
NB : Regardez à l’angle, la grosse tour carrée du donjon, seul vestige de la forteresse primitive conservée par Jean Breton.
Il est bien vrai que Jean Breton, le bâtisseur de l’élégante et sobre bâtisse avait déjà ramené d’Italie ce goût des jardins (il avait été ambassadeur à Rome) mais c’est son propriétaire de 1906 Joachim Carvallo et sa femme, Ann Coleman, qui en ont réalisé la splendeur actuelle. Et c’est leur arrière petit fils Henri Carvallo qui veille aujourd’hui au splendide ordonnancement des jardins.
Après le jardin d’ornement et ses salons de verdure : les « jardins d’Amour et le jardin de la musique » ( Châteaux en Pays de Loire 22 Villandry 1), cinq jardins restent encore à admirer : jardin d’eau, jardin du soleil (le plus récent), jardin des simples, labyrinthe, et spectaculaire jardin potager.
Même en présence de nombreux visiteurs, cette flânerie vous fait délicieusement passer du foisonnement à la rigueur ordonnée, du charme à la confidence, du monastère oublié à l’imaginaire odorant et, quasiment au silence de la méditation sous les tonnelles rêveuses qui comme d’hab’ nous signifient sans la moindre décence que nos ans sont « fuyants et bien courts ».