Mercredi des Cendres et Epilogue
Aujourd’hui, les Carnavaliers ont troqué le rouge vif pour le blanc et noir.
Voici les Guiablès (diablesses) présumées épouses de sa Majesté Vaval. Taffetas et foulards noirs, visages couverts de farine mais lèvres noires : Le Deuil est mis. C’est aujourd’hui qu’on brûle Vaval. Le Mas a lanmô (masque de la mort) est de sortie.
🔎 Il nous faut souligner un léger… paradoxe : le mercredi qui suit le Mardi gras est dans la tradition catholique le jour où après avoir reçu par le prêtre l’imposition des cendres, – celles des rameaux de la fête des Rameaux, bénis et brûlés, – sous la forme d’une croix sur le front, on entre en Carême, 40 jours de jeûne et d’abstinence pour préparer Pâques et la Résurrection.
Il s’agit donc de rappeler la voie de l’humilité, de la pénitence et la conscience de n’être que … cendres. Donc comment associer ce terrible jour des Cendres à la poursuite folle d’un Carnaval où manger gras, boire fort, ripailler et koker sont la norme. Pécher gravement, en somme ! Quelle trahison ! Quel blasphème !
Comment le carnaval païen peut-il se permettre d’annexer effrontément le jour d’entrée en carême de toute la communauté catholique planétaire ?
Qu’à cela ne tienne, le diable ayant toujours raison, l’église a décidé de repousser à la Martinique, comme dans le reste des Antilles françaises, d’ailleurs, l’imposition des cendres au … vendredi. Ecco ! Ouf ! Envolé le blasphème, effacée la forfaiture, radié le péché !
A la tombée de la nuit, après les derniers vidés on accompagnera Vaval jusqu’au bord de mer, pour l’y brûler.
Avec VAVAL on brûle la fin du carnaval irrévérentieux subversif et gaillard pour entrer dans le Carême, ses cendres, sa pénitence, sa contrition.
Retour à l’ordre, et ravalement des corps ?
En tous cas moments forts et magiques. Dépêchez vous ! Ici, le spectacle touristique n’a pas encore gagné et détruit la tradition ancestrale. La préoccupation n’est pas (encore !) d’être beau, propre et devenir célèbre afin d’attirer les foules de voyeurs du monde entier. Ce carnaval n’est pas (encore) dans les rangs. Ni dans les clous. Il est une fête incandescente que les Martiniquais s’offrent à eux-mêmes et non un produit mercantile à vendre et à consommer, un charivari et non un divertissement spectaculaire pour agences de voyages.
Héritage auquel tiennent les Martiniquais. TOUS les Martiniquais y compris ceux qui se soustraient le temps de ces manifestations en s’envolant pour Sainte Lucie, ou Saint Martin
Mais l’Ordre jacobin veille et grignote peu à peu les petites libertés espiègles et autres singularités exotiques. Mort au désordre et au non conforme ! Témoin ce document officiel du nouvel espwi kannaval.
Autant hélas ! de pertes symboliques de la fête païenne, atavique et pimentée et… traversée de forces telluriques.
Voilà ! les belles ci-dessous vous disent : » à l’année prochaine pour le Carnaval 2023 « . Incitatif, non ?
Car, le propre de Vaval ka kité nou, c’est de renaître de ses cendres, accomplissant le vieux mythe mort/résurrection.