PARAVUR, lac et mangrove
Départ matinal en pirogue sur ces belles étendues calmes à peine frémissantes de quelques paillettes de lumière naissante, sur leur front serré de palmiers taiseux.
Au détour d’un chenal, jolis scènes matinales et bibliques de jeunes pêcheurs dans leur coque de noix. Ce bateau-panier autrefois en fibres de coco et osier tressés, aujourd’hui en plastique, c’est le Coracle, vieux de 5000 ans et présent partout dans le monde lacustre.
La femme pagaie et son mari lance le filet, l’avantage de ces bateaux paniers en effet est la stabilité mais ils ne pourraient soutenir la moindre vague sérieuse avec leur fond plat et leur absence de quille.
Voilà que nous nous enfonçons dans la pénombre des voûtes basses de la mangrove, royaume du fabuleux palétuvier Rhizophora, déjà rencontré si souvent, en Afrique, au Venezuela, en Haïti, en Martinique …
Nous longeons sans bruit la galerie de ces incroyables racines-échasses ancrées dans la vase mais qui se projettent si haut dans un embrouillis inextricable et d’un riche graphisme.
En réalité, le projet n’est pas d’éblouir peintres, dessinateurs et photographes dans des compositions magiques – qui ne sont pas à la portée d’un designer -, mais d’aller récupérer très haut l’oxygène de l’air pour l’envoyer fissa à toutes les parties immergées de l’arbuste !
N’empêche ! Je confirme : ces entrelacs savants qui réjouissent l’oeil ne sont pas à la portée d’un designer ! Surtout quand le soleil se mêle d’aller iriser la surface paillettée de l’eau ou jouer avec les ombres de ces tiges multiples pour composer à foison des clairs-obscurs sans cesse mouvants.
A peine extraits de la grotte végétale, nous rencontrons d’autres pêcheurs au coracle, dans cette douce et chaude lumière des premiers matins du monde
La légèreté et la souplesse du coracle fait qu’un pêcheur expérimenté pourrait à la fois aisément manoeuvrer d’un bras et lancer le filet de l’autre mais il va de soi que son usage réduit l’assigne au petites pêches familiales.
Cette végétation ligneuse, les kandal, qui évidemment est loin de se limiter à l’espèce Rhizophora qui nous est plus familière, remplissent, disent les scientifiques des fonctions écologiques essentielles. A vue de nez elles empêchent d’abord l’érosion côtière et agissent comme des barrières contre les cyclones et les tsunamis (leur rôle important dans la réduction de l’impact du tsunami de 2004 dans l’océan Indien en témoigne)
Hélas en 50 ans la construction et l’immobilier plus la recherche constante d’espaces à cultiver, à exploiter (noix de coco, riz, aquaculture… ) ont dévasté plus de la moitié de la surface des mangroves et ne parlons pas de l’importante pollution.
D’autant que plus de la moitié de la zone appartient à des propriétaires privés, et les gangs de l’immobilier qui ne s’intéressent bien évidemment qu’à leur business, leur proposent un bénéfice économique direct et immédiat.
NB : Ne pas oublier de prononcer des mantras en passant devant cet ilôt pour invoquer la divinité honorée ici
Et nous voilà de retour au Fragrant Nature Retreat and Resort que nous quittons après le repas pour Alappuzha.